Quand on pense à un service efficace de commerce en ligne, sans doute que le premier nom qui vient à l’esprit est Amazon. Le géant américain a su s’affirmer au fil des ans et compte des millions d’utilisateurs.
Pourtant, cette plateforme a du souci à se faire depuis une dizaine d’années avec l’entité africaine Jumia. Si vous ne la connaissez pas, sachez que cette plateforme pouvait se targuer d’être une licorne africaine ; statut que beaucoup de start-up rêvent d’atteindre.
L’idée qui a tout changé
Ce sont les français Jérémy Hodara et Sacha Poignonnec qui sont à l’origine de Jumia. L’Afrique est en plein développement. Il est vrai que la population africaine a de nombreux besoins et qu’il peut être facile, pour des personnes ayant de bonnes idées et l’envie de retrousser leurs manches, de développer un projet viable. Mais sans doute que les créateurs ne se doutaient pas à quel point la leur allait rapidement se développer.
Créer un Amazon africain était clairement l’idée de base, soit une plateforme d’e-commerce mettant en relation des vendeurs et des consommateurs et permettant d’acheter tout aussi bien des produits que des services, avec un paiement en ligne sécurisé.
Cela est effectif en 2012, par le groupe Africa Internet Group, au Nigeria, même si l’entité est immatriculée à Berlin.
Pourtant, les créateurs le savent : la grande majorité des africains ne possède pas de compte bancaire, ce qui explique que les transactions via les téléphones portables explosent depuis des années (voir la licorne Wave qui entend répondre à ce phénomène avec des prix cassés) : comment faire, alors, pour payer les transactions faites sur le site ? La réponse est simple : les utilisateurs et clients pourront payer en espèces, à réception de leur colis.
L’idée étant cependant que le paiement à distance se démocratise, petit à petit, sur l’ensemble du continent africain. Il est même possible de passer commande par téléphone, sans compter que les retours sont faciles et gratuits : de quoi convaincre les plus sceptiques.
L’idée séduit et dès le démarrage, la start-up reçoit beaucoup de soutien financier. Quatre ans plus tard, en 2016, l’entreprise lève 300 millions d’euros.
Le développement et la consécration de Jumia
Le succès de la plateforme est immédiat. Entre produits électroniques, produits d’hygiène, services et autres produits alimentaires, Jumia entend répondre au plus grand nombre.
A peine trois ans après sa création, le site enregistre un chiffre d’affaires estimé à 134.06 millions d’euros, soit le double de l’année précédente. Pourtant, les fondateurs savent que l’entreprise n’est pas encore rentable : l’argent sert au développement de l’entité, à son essor sur l’ensemble du territoire africain.
Avec une action de rebranding efficace, en 2016, Jumia gagne clairement en visibilité, puisque toutes les entreprises se voient accoler son nom à leur activité. Alors que l’on connaissait une structure comme étant Everjobs, elle se transforme ainsi en Jumia Jobs.
En tout, ce sont 9 sites s’inspirant de gros succès à travers de monde qui voient le jour et maturent à vitesse différente à destination du peuple africain, qui est en attente de ce type de prestation. C’est cette année-là qu’elle est valorisée à plus d’un milliard d’euros.
Le paiement en ligne, appelé de façon évidente Jumia Pay permet l’essor de ce moyen de paiement, ce qui était difficile à la création. Moins de 5 ans après, cela représente 40% des transactions.
En 2018, soit moins de 6 ans après sa création, Jumia est présente dans 14 pays du continent africain ; car toute la population ne bénéficie tout simplement pas d’un accès à Internet.
Absent de ce territoire, Amazon a là un sérieux concurrent, ce qui vaut à Jumia d’être qualifié d’Amazon Africain.
Au fil des années, de nouveaux centres technologiques fleurissent un peu partout en Afrique, même si le centre technique reste toujours au Portugal.
Jumia n’entend pas pouvoir rivaliser pourtant avec Amazon qui peut se permettre, avec certains contrats premium de livrer en 2 heures. Les contraintes ne sont pas les mêmes et il faut composer aussi bien avec des aléas météorologiques que des coupures régulières de courant. Il n’empêche qu’un utilisateur client est certain d’être livré, dans le pire des cas dans les trois jours.
Jumia : informations clés
Date de création de Jumia
Même s’il faut parler plus précisément d’Africa Internet Group, le site prend son nom définitif en 2012, lors de sa création pour devenir Jumia. L’essor est très rapide.
Nombre de salariés à ce jour
Il est difficile de chiffrer exactement le nombre de personnes qui sont salariés par Jumia. 5 000 personnes travaillent activement pour le site, mais il faut aussi compter sur les personnes qui aident les acheteurs n’ayant pas d’ordinateur.
En leur prêtant leur matériel et en se faisant les intermédiaires de Jumia, on parle plus d’ambassadeurs qui, pour ce travail, obtiennent un complément de revenus, plutôt qu’un travail à plein temps.
Chiffre d’affaires en 2022
Le premier trimestre 2022, Jumia avait fait un chiffre d’affaires de 47.6 millions de dollars.
Une possible entrée en bourse ?
La licorne africaine Jumia perd son terme magique pour entrer à la bourse de New-York en avril 2019. Il n’a fallu que 7 ans pour arriver à ce résultat.
Les objectifs de développement de Jumia
Jumia est présente dans de nombreux domaines : voyages (Jumia Travel), le travail, l’alimentation. D’ailleurs, dans ce dernier poste qui compte également les boissons, Jumia entend conclure des partenariats intéressants. C’est le cas cette année (2022) avec Coca-Cola. Les consommateurs peuvent tout simplement s’offrir leur boisson gazéifiée préférée directement en ligne.
Même si l’entreprise existe depuis 10 ans, elle a souhaité mettre en lumière cette année des thèmes qui lui sont chers, dans le cadre de son RSE, notamment dans la préservation de l’environnement, le social ou encore respecter des normes éthiques à différents niveaux (vendeurs, acheteurs, gouvernance). Il y a quelques mois, les livraisons sur le territoire kenyan commençaient à se faire en voitures électriques, pour matérialiser cette responsabilité sociétale.
Scalabilité
Le pouvoir de développement de Jumia reste immense car on peut dire que le continent Africain dans sa grande globalité reste une niche dans de nombreux domaines.
Même si à ce jour, Jumia n’est pas à considérer comme une entreprise rentable, comme beaucoup de ses consoeurs licornes (ou anciennement, puisqu’une start-up perd ce statut en entrant en Bourse), son chiffre d’affaires est toujours croissant. Jumia, prouve, cette année encore, avec son partenariat avec Coca-Cola, qu’elle continue à vouloir se développer mais aussi répondre aux besoins de la population africaine.
Sa solution de paiement en ligne, mais aussi la possibilité de payer en espèces est la preuve que l’entité a conscience des problèmes, mais qu’elle essaie d’aller de l’avant, par tous les moyens, quitte à toujours trouver des solutions aux problèmes structurels.
Si les membres fondateurs ont quitté le navire cette année, la reprise par Francis Dufay et Antoine Maille-Mazeray (CEO d’intérim et EVP finance et logistique) a pour objectif de gagner en rentabilité à partir de 2023.
Outre les efforts des dirigeants, la plateforme fonctionne aussi grâce à la confiance des vendeurs et des acheteurs. En 2020, le site répertoriait 40 millions de produits, vendus par 110 000 vendeurs, avec 6.9 millions d’utilisateurs. On estime que toutes les deux secondes, une transaction est faite sur Jumia, l’Amazon africain dans 23 pays.
La maxime ou citation la plus marquante de la start-up
Rester humble, est-ce possible quand on fait un tel chiffre d’affaires et que son entreprise est entrée en Bourse ?
L’Afrique est sans doute une excellente école d’humilité. Ce n’est sans doute pas pour rien que les dirigeants, avant de céder les rênes, continuaient à prendre des vols éco pour solutionner les problèmes de livraison, avec cette maxime qui leur colle à la peau « Innovate with thriftiness » que l’on pourrait traduire par « innover sans trop dépenser ». Jumia prouve tous les jours que cela est possible.